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Je t'ai montré le chemin d'Ars... tu me montres le chemin du Ciel!
13 février 2012

Jean-Marc : Ca y est ! La radio, c’est fini… À nous deux, la chimio !!

Durant cette hospitalisation qui dure trois jours, une nouvelle étape est franchie.

La confrontation avec mes compagnons d’infortune, dans le même service où l’on peut découvrir toutes les étapes de la maladie.

« Tiens, dans trois mois, je serai peut-être comme celui-là. » véritable sac d’os recouvert d’une peau blafarde. Passage indispensable pour s’assurer que je suis bien sorti de toute forme de déni.

Personnel hospitalier super accueillant et sympathique (presque trop) je comprends à présent  certaines réactions violentes : « Votre compassion, je n’en veux pas ! » Certaines formes de compassion sont en effet insupportables lorsqu’elles rappellent sans cesse au malade sa maladie. Certains sourires compatissants sont pires qu’une insulte. Le premier fruit de la compassion est de tout simplement relever l’autre dans sa dignité et de le faire entrer dans l’Espérance.

La honte rôde souvent autour de la maladie. Honte de son délabrement physique, peut-être irréversible. Honte devant ses petits-enfants qui avaient de vous une tout autre image. « Non, bon-papa est fatigué. Vous ne pouvez pas jouer avec lui. »

Honte de sa fatigue, de son inefficacité. Si je devais être embauché dans une entreprise, je pourrais négocier mon salaire à 1/10 de SMIC et encore, c’est le patron qui serait perdant. Que peut-on faire de sa honte ? La meilleure thérapie est certainement de se l’avouer, de la dire… Et je vous remercie donc, car vous m’économisez le prix d’une psychothérapie (il n’y a pas de petite économie étant donné le salaire que je mérite).

La douleur ! Certains disent qu’on s’y habitue. D’autres sont « durs à la souffrance ». J’ai l’impression de l’avoir fréquentée assez souvent durant ma vie. Mais pour moi, elle est toujours une intruse qu’il faut chasser, jamais pleinement acceptée, même si elle peut être parfois offerte.

« Va-t’en, sale bête ! Arrête de me pourrir la vie ! »


Je découvre quelque chose qui m’habite, peut-être depuis longtemps. C’est la joie de voir les autres,  vivre et être heureux.
Au cœur d’une maladie où la perspective de la fin est possible, la démarche du renoncement m’est indispensable. Renoncer à la bonne santé, à faire du ski, du tennis, à simplement marcher en montagne, à aller voir une exposition dont j’avais rêvé… J’avais déjà fait certains de ces renoncements.

Mais le chemin n’était pas terminé.

Ce qui peut vraiment me faciliter ces différents renoncements, c’est de devenir spectateur volontaire et enthousiaste (et non pas nostalgique ou amer) des moindres gestes de tous mes frères et sœurs qui peuplent mon quotidien : proches, amis, mais aussi tous ceux et celles qu’on croise rapidement ou que l’on aperçoit sans les connaître. Ils accomplissent ce qu’aujourd’hui je suis incapable de faire et je ressens du bonheur pour eux. Je me dis simplement : « Puissent-ils se rendre compte de la chance qu’ils ont ! » Me réjouir du spectacle de la vie toute simple, alors que j’ai l’impression d’en être un peu exclu, me fait entrer à nouveau de plain-pied en elle. C’est une sorte de communion avec toute l’humanité.

Je remercie le Ciel de me donner chaque jour cette grâce d’un regard émerveillé sur chaque être humain que je croise, ne serait-ce qu’un instant. La vie demeure la plus forte même si ma petite personne risque de s’en éloigner.

Et puisque nous parlons de communion : je voudrais aujourd’hui vous présenter deux personnes que je connais bien pour les associer à mon humble témoignage.

Nicolas, mari de Geneviève, à Lyon, a été victime d’un très grave accident de moto en juillet 2011. Longue hospitalisation, coma et aujourd’hui, à cause de lésions irréversibles, énormes incertitudes sur l’amélioration de sa santé. On ne peut qu’imaginer son angoisse, étant donné qu’il ne communique pratiquement pas ; ainsi que le vécu quotidien de son épouse et de sa famille.


Christine, (amie depuis 20 ans) a accepté à cause de mon insistance, de nous livrer ces quelques lignes :
« J'ai 55 ans et depuis toujours la maladie est présente dans ma vie par vagues successives ; j'ai été confrontée à la mort à plusieurs reprises et j'ai appris à vivre au jour le jour sans savoir de quoi serait faite la nuit suivante. De belles périodes d'accalmie aussi, joie de vivre comme tout le monde, puis à chaque fois, nouvelle épreuve.

La Foi m’a énormément aidée à traverser toutes ces périodes difficiles, en offrant bien pauvrement tout ce que je vivais pour telle personne, telle cause, pour le monde en général... Savoir que l'on ne souffre pas pour rien, que nos peurs, nos angoisses, notre fatigue infinie, notre pauvreté à vivre ces épreuves, et bien Dieu en fait ce qu'Il veut, où Il veut, en union avec ses propres souffrances et angoisses...

Le choix se présente à chaque fois: se tourner vers Dieu ou l'oublier. Cela m'est arrivé une fois où j'ai lâché la main du Seigneur au lendemain d'une dure opération du cœur à Paris : chute libre !

Quel étonnement par contre devant tant de personnes qui souffrent sans pouvoir donner un sens à ce qu'ils vivent et à leur vie en général. Sans doute le Seigneur leur donne des grâces à leur insu ?

J’ai compris un peu plus cet hiver que le Seigneur n'attend pas que je lui offre de "belles choses" avec de "belles prières". Mes angoisses, ma souffrance, mon ras le bol sont à Lui, c'est tout ce que j’ai à Lui donner certaines fois... et Il prend tout ! Vivre dans la joie ces moments difficiles, je n'y arrive pas ; un jour peut-être ! Mais dans la paix, le sourire, l'accueil, oui, du moins j'essaie. Et le sacrement des malades (que j'ai reçu 3 fois à des moments critiques) m'a véritablement portée et apaisée.

Qu'importe ce que l'on peut faire dans la vie – ou ne pas faire car nos limites sont si vite atteintes – ce qui compte, c'est comment on vit ce qui nous est donné de vivre. Cela nous appartient et notre liberté reste entière à ce niveau-là !
Bonne route à chacun, la vie est belle ! Christine »

Après ce témoignage, on ne peut que faire silence et se rappeler cette phrase de Saint-Paul qui a fait couler tellement d’encre :
"J'achève en ma chair ce qui manque à la Passion du Christ."

Il me semble que nous pouvons, sans aucune honte, prononcer cette phrase, du bout des lèvres, du bout du cœur.

Dieu, si nous acceptons sa proposition, ne fait pas de nous (par sa grâce) des sauvés PASSIFS, mais des collaborateurs de notre salut et du salut des autres.

Nous sommes en tant que chrétiens, le Corps du Christ. Nous sommes, chacun pour sa part, membres du Corps du Christ, c'est-à-dire que notre destinée, aujourd'hui comme demain, c'est de vivre ce qu'a vécu le Christ, et rien d'autre.

Aujourd'hui : "Là où Je suis, a dit Jésus, vous serez aussi". Avant d'être avec Lui dans la gloire, il nous faut être avec Lui dans la Passion et dans la disparition.

Christine, Nicolas, Geneviève et moi choisissons de nous associer à cette assertion de St Paul, parce que si c’est vrai pour lui, c’est vrai pour nous. Petitement, maladroitement avec toutes nos limites et nos peurs, nous voulons bien déposer la souffrance qui est la nôtre dans cet immense calice qui recueille et offre la souffrance humaine.

Bienvenue à ceux qui veulent se joindre à nous.

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Commentaires
F
Bonsoir,<br /> <br /> <br /> <br /> Je lis votre blog depuis que nous en avons eu l'adresse par des amies communes de Versailles. Je suis profondément bouleversé par votre témoignage. J'ai toujours les larmes aux yeux en vous lisant. Larmes sourire, larmes tristesse, larmes de Marie-Madeleine, larmes d'admiration... C'est le cadeau que j'ai reçu à la Sainte Beaume et en ce moment il est particulièrement utilisé! Merci pour votre journal qui élève l'âme et me conduit plus près du Christ.<br /> <br /> Je prie pour que l'Espérance ne quitte pas vos coeurs. Vous êtes des phares brillants, vos faiblesses sont des leviers d'Amour extraordinaires.<br /> <br /> <br /> <br /> Fraternellement,<br /> <br /> <br /> <br /> François
V
En partageant ton chemin, ton cheminement, ta route nous vivons avec toi et tu nous permets ainsi de porter un petit peu de ton fardeau et de réfléchir plus en profondeur au bonheur de notre vie avec Lui, grâce à Lui.<br /> <br /> Reçois mes pensées affectueuses détachées espéranFoi pour toi et les tiens <br /> <br /> V
C
Oui,à nous deux la chimio ! et Merci Aléatoire d'avoir si bien choisi!<br /> <br /> Merci pour votre simplicité, votre authenticité et votre foi formidables ! Saint Camille de Lellis vous a drôlement servis pour libérer parole et sentiments et... chouette, pas besoin d'un psy en plus, pas remboursé par la Sécurité Sociale !! <br /> <br /> heureusement qu'après la chimio, tu peux te reposer Jean Marc sur : un tapis de prière, ou dans une maison de retraite, avec en prime ton horoscope! t'en as de la veine ! <br /> <br /> (au cas où vous n'auriez pas compris, ce sont les pubs sous vos messages.)<br /> <br /> Gros baisers,<br /> <br /> Corinne<br /> <br /> <br /> <br /> <br /> <br /> <br /> <br /> <br /> <br /> corinne
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  • Parler la mort ! Accompagner son mari en phase terminale de cancer, sans peur de la mort. Prendre le temps, avec lui, d'évoquer l'au delà de la mort. D'une potentielle Vie après la vie. Demander des "signes tangibles" et au cœur du chagrin les recevoir !
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